Moussa Dadis Camara a été condamné mercredi à 20 ans d’emprisonnement pour crimes contre l’humanité, pour sa responsabilité dans le massacre du 28 septembre 2009 en Guinée. Il entend faire appel du verdict, a immédiatement annoncé son avocat, Pepe Antoine Lama.
Parmi les coaccusés du capitaine Camara, figurait Moussa Tiégboro Camara, son ancien secrétaire d’Etat chargé des services spéciaux, de la lutte antidrogue et du grand banditisme, condamné également à vingt ans de prison. Son neveu et ancien membre de sa garde rapprochée, Marcel Guilavogui, a été condamné à dix-huit ans de prison. Le tribunal a été plus clément avec l’ancien aide de camp de Moussa Dadis Camara et chef de la garde présidentielle, Aboubacar Toumba Diakité. (En 2009, c’est lui qui avait tiré une balle dans la tête de son chef, à laquelle Moussa Dadis Camara avait miraculeusement survécu). Il a été condamné à dix ans de prison. La perpétuité a été prononcée contre Claude Pivi, l’ancien chef de l’antidrogue, qui manquait à l’appel lors du verdict (en novembre 2023, il est parvenu à s’évader de la maison centrale de Conakry).
Ibrahima Sory II Tounkara, le président du tribunal : « Il convient de déclarer Moussa Dadis Camara coupable de crimes contre l’humanité sur la base de la responsabilité du supérieur hiérarchique »
La présidente de l’Association des victimes, parents et amis du 28 septembre (AVIPA) :« L'aboutissement d'un combat de 15 ans, celui de la recherche de la vérité et la justice pour les victimes … Nous continuerons à œuvrer pour que chaque victime obtienne réparation et pour que de tels événements ne se reproduisent plus jamais en Guinée »
Amnesty international : « Un verdict historique pourra servir d’exemple dans le monde entier et en Guinée, où l’utilisation illégale d’armes à feu et l’utilisation excessive de la force lors de manifestations reste monnaie courante »
Le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a salué le verdict : « un tournant dans l’établissement de la vérité sur les événements du 28 septembre 2009 et dans la reddition des comptes par ceux qui portent la plus grande responsabilité dans les atrocités qui ont été commises … Les juges guinéens ont envoyé un signal clair selon lequel personne n'est au-dessus des lois »
Le 28 septembre 2009, le stade de Conakry, où se tenait un meeting de l’opposition pour protester contre une éventuelle candidature de Moussa Dadis Camara à la présidentielle, est devenu le théâtre d’un déchaînement de violence. Alors que les leaders de l’opposition se relayaient au micro pour dire leur désapprobation quant à une éventuelle candidature du chef de la junte, des soldats cagoulés ont fait irruption dans l’enceinte. Au moins 156 personnes ont été tuées par balle, à coups de machette ou de couteau, par des éléments des forces de défense et de sécurité guinéennes déchaînées. Mille quatre cents personnes ont été blessées. Plus de cent femmes ont aussi subi des viols et des mutilations sexuelles, selon une commission d’enquête internationale mandatée par les Nations unies. Certaines ont été séquestrées et contraintes à devenir des esclaves sexuelles durant les jours suivants dans des camps militaires ou des villas de la capitale. Les militaires se sont ensuite lancés dans une opération de dissimulation, inhumant les corps dans des fosses communes.
A la tête Comité national pour la démocratie et le développement, Moussa Dadis Camara a dirigé la Guinée du 23 décembre 2008 au 3 décembre 2009. à la tête du au pouvoir après un coup d’État.